Le Rallye Dakar 2008 annulé à cause de menaces terroristes pour la première fois depuis sa création en 1979, le Dakar n'aura pas lieu cette année à cause de "menaces directes" venant de "mouvances terroristes" sur le rallye-raid. La 30e édition de la course, qui devait partir samedi de Lisbonne, a été annulée pour des raisons de sécurité, a annoncé vendredi l'organisateur ASO.
"Après différents échanges avec le gouvernement français (...) et compte tenu de ses fermes recommandations, les organisateurs du Dakar ont pris la décision d'annuler l'édition 2008 du rallye, programmée du 5 au 20 janvier prochains entre Lisbonne et la capitale sénégalaise", a expliqué Amaury Sport Organisation dans un communiqué. Environ 550 véhicules devaient disputer la course.
ASO a précisé que cette décision avait été prise après l'assassinat de quatre touristes français, abattus le 24 décembre près d'Aleg (255km au sud-est de Nouakchott) par des islamistes présumés reliés "à une branche d'Al-Qaïda au Maghreb islamique", et après "des menaces directes lancées contre la course par des mouvances terroristes". Le 27 décembre, trois soldats mauritaniens ont également été tués lors d'une attaque contre l'armée dans le nord-est du pays.
"Le gouvernement français a invoqué la raison d'Etat pour nous recommander formellement de ne pas donner le départ du Dakar", a ajouté le directeur de l'épreuve Etienne Lavigne lors d'une conférence de presse à Lisbonne en ajoutant que "des communiqués d'Al-Qaïda au Maghreb citaient le Dakar". Un communiqué du 29 décembre dernier, évoquant des actions menées en Algérie et en Mauritanie, s'en prenait ainsi au régime mauritanien accusé de "protéger ses maîtres" et de "fournir aux infidèles les meilleures conditions pour le Rallye (Dakar)".
Huit étapes du rallye-raid étaient prévues dans ce pays, où la France avait "fortement" déconseillé jeudi à ses ressortissants de se rendre après le drame d'Aleg.
"On a peut-être plié devant le terrorisme, mais notre groupe n'a pas le droit de faire courir ce risque à tous les gens qui lui font confiance", a déclaré à l'Associated Press le président d'ASO, Patrice Clerc, confirmant que les menaces venaient d'Al-Qaïda. "A partir du moment où on parle de terrorisme aveugle et individuel, personne ne peut faire face à ce genre de menaces. On n'a pas le droit de jouer avec la sécurité."
L'annulation de l'édition 2008 "ne remet pas en cause l'avenir du Dakar", ont cependant tout de suite assuré les organisateurs. "Proposer, dès 2009, une nouvelle aventure à tous les passionnés du rallye-raid est un défi qu'ASO saura relever dans les mois qui viennent, fidèle à son engagement et à sa passion pour le sport."
Côté mauritanien, on disait ne pas bien comprendre cette annulation, assurant que "toutes les garanties avaient été données" à ASO et disant ne pas être au courant de menaces particulières. Côté français, le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner a qualifié de "sage" une décision prise "dans un contexte de sécurité insuffisant".
Tenant du titre de l'épreuve dans la catégorie auto et multiple vainqueur en moto, le Français Stéphane Peterhansel a lui aussi salué le bon sens des organisateurs. "Si ASO a pris cette décision, c'est avant tout pour la sécurité de chacun et je crois que ce genre de choix on ne peut que le respecter", a-t-il dit sur i>télé.
C'est la première fois que l'épreuve est totalement annulée. En janvier 2000, les organisateurs, avertis d'un risque d'attentat du GIA algérien, avaient annulé les étapes prévues au Niger, organisant un pont aérien pour poursuivre l'aventure en Libye. L'an passé, des menaces du GPSC (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) algérien, aujourd'hui fondu au sein d'Al-Qaïda au Maghreb islamique, avaient contraint les organisateurs à annuler les deux étapes prévues au Mali.
"Que voulez-vous qu'on fasse? A partir du moment où il y a une recommandation du gouvernement, il n'y a pas d'autre solution", a commenté sur France-3 Jean-Louis Schlesser, double vainqueur de l'épreuve qui devait prendre le départ avec le dossard 309.
René Metge, ancien vainqueur du Paris-Dakar (1981, 1984, 1986) puis organisateur de l'épreuve (1987, 1988), a estimé dans un entretien accordé au site Sports.fr que l'annulation de la course cette année signait probablement son arrêt de mort.
"C'est une mauvaise nouvelle et je pense même que c'est la fin du rallye africain. C'est presque un coup d'arrêt définitif", a-t-il affirmé. "Et je ne parle pas que du rallye, je pense notamment au tourisme, à l'ouverture au monde... Les plus à plaindre ne sont pas forcément les organisateurs du Dakar pour qui cela constitue surtout un problème financier. Je pense aux Africains. C'est dramatique. Ce sont eux qui vont être les premiers touchés, car le Dakar constitue une manne non négligeable".